Divinités courroucées et apaisées...
Ça y est !! je le fais, cet article promis !
J'ai fait une remarque il y a quelques temps : La Golden Dawn a utilisé des noms d'entités "normalisés", c'est-à-dire que pour certaines entités, elles devraient avoir deux faces, bien spécifiées dans les manuscrits de John Dee : Une courroucée et une autre apaisée. La société en question a ramené les noms à un nom unique, concaténation des deux noms.
Imaginons une entité ayant le nom "pile" pour la partie courroucée, et "face" pour la partie apaisée; la Golden Dawn aurait probablement écrit "pilface". Le cas le plus flagrant est l'un des seigneurs élémentaux de l'Est :
- Bataiva : apaisé, 7 lettres (aucun rapport avec la batavia !!
)
- Bataivh : courroucé, 7 lettres
La Golden Dawn a écrit "Bataivah", 8 lettres. Or le nombre de lettres en énochien détermine la nature de la force en présence. Double conséquence donc :
- Nous ne sommes plus sûrs que Bataivah soit un Roi élémental, même si le sens et donc la nature en sont proches (au vu de la théorie des essences)
- Nous ne sommes plus sûrs que Bataivah tienne l'office d'un Roi, puisque le cardinal de son nom a changé. Je n'ai trouvé aucune entité énochienne faisant 8 lettres (la majorité fait 7 lettres), il est à considérer que ce nom est un élément du vocabulaire énochien courant (absent du dictionnaire de Laycock) ou bien la juxtaposition de deux entités ayant moins de lettres chacune
La notion d'entité apaisée et courroucée se retrouve en dehors du contexte énochien, pour le Vaudou et pour le Bouddhisme tibétain.
Pour le Vaudou, c'est la distinction que j'opère entre les cultes "Loa Rada" et "Loa Petro". Les Loa, ou Lwa, sont l'équivalent des anges de la chrétienté, mêlés aux forces de la nature. J'avais cru lire il y a quelques temps, que :
- Les "Radas" sont associés à l'Eau, tandis que les "Petros" le sont au Feu
- Les deux cultes auraient des régions d'origine différentes au sein de l'Afrique, a priori et sans garantie, les Radas viendraient de l'Afrique littorale de l'Ouest, tandis que les Petros viendraient plus du Sud et de l'Est de l'Afrique noire
- Les Petros auraient souvent été invoqués pendant l'esclavage par les blancs, pour se libérer. Ils ne sont surtout pas à confondre avec la magie noire : Un bokor qui crée un zombi pour le réduire en esclavage, c'est l'hôpital qui se moque de la charité, non ?
Tout loa rada possède sa contrepartie petro, à l'exception des "Ogou" sijenemabuze..."Ogou shango" et "Ogou Fer" sont en rapport avec le Feu, le Fer, la Guerre, l'Orage, etc...
Prenons un loa rada, par exemple "Damballah", créateur suprême et un tantinet serpentesque ( ); sa contrepartie "Petro" est Damballah-la-Flambeau ou Damballah-Ge-Rouge. La règle linguistique est simple :
- [entité]+"-la-Flambeau" signifie "[entité] (porteur) du Flambeau"
- [entité]+"-Ge-Rouge" signifie "[entité] à l'Oeil Rouge"
La contrepartie Rada/Petro n'a clairement rien à voir avec la contrepartie mâle/femelle, la preuve en est de Damballah et son épouse, différente du Petro associé à Damballah
En outre, chaque loa est symbolisé par un talisman spécifique, le vévé du loa. Hé bien, il suffit de jeter un coup d'oeil aux vévés de Damballah, Damballah-Ayida et Damballah-La-Flambeau pour se convaincre de ce que je viens d'écrire...
Maintenant, examinons la tradition tibétaine :
Dans le Bardo-Thödol, le mort franchit différentes étapes, au cours de laquelle il va expérimenter différentes visions face auxquelles il devra faire des choix. Ces choix détermineront la manière dont il va se réincarner : Il est donc essentiel que le rituel funéraire puisse le guider puisque, d'après les lamas, l'esprit du mort peut encore entendre les suppliques de l'officiant. Le Bardo-Thödol catégorise en trois temps, trois phases, le chemin du défunt avant la prochaine réincarnation :
- Le Chikhai Bardo, le plus lumineux, lui montre ce qu'il a à gagner d'abandonner le monde des phénomènes en reconnaissant la part de conscience qui lui manque, dont je parle en "analyse de la magie"
- Le Chonyid Bardo, qui va spécialement nous intéresser, va durer deux semaines au bas mot (le Bardo n'est pas clair sur ce sujet). La première semaine le met face aux divinités apaisées, la deuxième face aux divinités courroucées
- Le Sidpa Bardo, le plus sombre et le plus inquiétant, lui fait traverser des zones de ténèbres, de cris, des orages, puis l'amène à la vision de portes vers le monde matériel, où il verra un couple en coït, préfigurant le foyer où il va renaître
Au vu de la "luminosité décroissante" des Bardos dans le périple surnaturel, j'ai tendance à penser que les divinités apaisées et courroucées sont de l'ordre du mental (intellect) et de l'astral (émotions). Elles rentrent de plain pied dans le domaine de la Magie...
Les divinités apaisées sont des Bouddhas, de couleur et d'attributions différentes, enlacés avec leur Shaktis et escortés par des boddhisattwas.
Les divinités courroucées sont des Herukas, flanqués de leur Shaktis, escortés par des Daikinis.
La troisième semaine voit les détenteurs de la connaissance, également escortés par des daikinis.
Le Bardo Thodol est très clair : Les Herukas sont exactement les mêmes divinités que les Bouddhas, même si leur apparence est différente. C'est la subjectivité et la perception du défunt qui les fait apparaître sous l'apparence courroucée. De plus, toujours selon le Bardo, les Herukas menaçants sont des divinités protectrices contre les forces du Mal que le défunt aura à coeur d'appeler dans les moments difficiles (en particulier dans le Sidpa Bardo).
Je crois que nous y sommes :
Les divinités courroucées/apaisées en énochien ont le même rôle que les Radas/Petros du Vaudou ou les Bouddhas/Herukas tibétains : D'apparence redoutable, elles ne sont pas les forces du Mal, elles aident au contraire à s'en protéger en "gérant" pour nous la peur des choses qui nous dépassent
Les divinités "à double face" en énochien sont :
- Les Vieillards de l'Apocalypse (pas tous)
- Les Rois Élémentaux (tous)
- L'un des gouverneurs de ZAX, (L)EXARPH
Au sujet du gouverneur de ZAX, je ne sais pas exactement si sans le "L" de sévérité, il représente une divinité apaisée. Une telle réponse serait particulièrement intéressante, elle pourrait représenter un pont énergétique au-dessus de l'Abysse. L'ange qui a parlé du "L de sévérité" est, de mémoire, Ave (à vérifier). Dans ce cas, EXARP, HCOMA, NANTA, BITOM ne seraient pas les quatre éléments, mais plutôt les quatre mondes du sepher yetzirah, en place "EXARP" au sommet, près de l'Abysse séparant le divin du manifesté. Cela expliquerait également la répartition de ces quatre noms sur l'étrange pentagramme de Cagliostro, vu en rêve par un ami...
Un peu de statistiques :
- Nous avons 1 gouverneur, 4 Rois et 8 Vieillards soit 13 entités "doubles"
- Sur ces 13 entités, la sévérité s'exprime toujours par l'une des 3 lettres "A", "L" et "H". Le "S" apparaît une seule fois, chez l'un des vieillards
- La sévérité peut s'exprimer en préfixe, en suffixe et en infixe (au sein d'un mot)
- On peut dresser un tableau récapitulant le comptage
En utilisant l'outil d'analyse RapidMiner, je me rends compte tout d'abord :
- La lettre la plus utilisée est le "L", ce qui confirme les dires d'Ave.
- La position la plus utilisée est le préfixe, comme dans (L)EXARPH
- Les quatre tours de guet sont parfaitement équilibrées quant au nombre d'entités à double face : 3 chacunes (1 Roi + 2 vieillards), LEXARPH étant hors quartier. On peut imaginer une sorte de pyramide des entités à double face
Allons plus loin : Je fais tourner une classification non-supervisée (UPGMA) et je m'aperçois rapidement que la place de la lettre de sévérité n'a pas de préférence globale, sauf pour le "A" où elle est toujours préfixée.
Pour ceux qui disposeraient de l'outil Yale/Rapid-Miner, voici la filière de calcul que j'ai utilisée :
Enfin, concernant les Rois et les Vieillards, il est à remarquer que les lettres marquant le courroux ou l'apaisement correspondent exactement aux deux lettres centrales, elles-mêmes comprises dans les deux colonnes centrales à chaque quartier et dans les bannières :
En vert : les bannières
En bleu : les axes selon lesquels sont tirés les noms des Vieillards
En rouge : les deux lettres déterminant l'apaisement ou le courroux
En rose : Le chemin circulaire de lecture des Rois élémentaux
A remarquer la fourche bifide à la fin de ce chemin pour les Rois.
Conclusion : Pour chaque quartier, les deux colonnes perpendiculaires à la ligne des bannières déterminent quatre des six vieillards du quartier. La colonne de gauche est celle de la Miséricorde, tandis que celle de droite est celle de la Sévérité.
A+,
Hiramash.